Retrouver des carottes jaunes ou violettes

La carotte existait déjà sur la table des romains. Mais à l'époque, elle ne ressemblait pas du tout à la nôtre : elle était blanche et fibreuse. Était-ce d'ailleurs vraiment une carotte ? Les écrits que nous ont laissés les auteurs de l'époque ne permettent pas de savoir avec précision s'il s'agissait de la carotte ou de son cousin le panais. Quoi qu'il en soit, les racines que mangeaient les romains rappelaient plus la carotte sauvage qui pousse spontanément dans nos campagnes que les carottes oranges, charnues et sucrées d'aujourd'hui. Et les racines de la carotte sauvage sont certes comestibles mais... blanchâtres, amères et dures.

La carotte orange naît aux Pays-Bas

La carotte orange et charnue que nous connaissons serait, elle, originaire d'Afghanistan. En effet, sur ces terres orientales, on cultive aux alentours du XIè siècle des carottes pourpres et jaunes – là encore, nulle trace de la couleur orange ! Cette racine orientale et colorée se répand tout autour du bassin méditerranéen et en Europe de l'Ouest au XIVè siècle. Mais la danse des couleurs continue et la population française adopte plutôt une carotte blanche qui apparaît peu après. Son succès n'est rien en comparaison de celui, absolu, de la première carotte orange qui naît au XVIIè siècle aux Pays-Bas. Riche en carotène, charnue, elle plaît immédiatement ! Et c'est à partir de cette variété là que partent ensuite toutes les sélections de carottes modernes, jusqu'à celles de nos assiettes. Au fil des années, de très nombreuses variétés se développent sur tout le territoire. Plus sucrées, plus douces, plus faciles à cuisiner, elles se prêtent à de multiples recettes. Au jardin aussi, les variétés de carottes primeurs, qui colorent les étals de printemps, côtoient les carottes de garde que l'on récolte en début d'hiver.

Retrouver des carottes jaunes ou violettes

Au début des années 1980, la production de carottes s'intensifie et s'uniformise. De moins en moins de variétés sont cultivées : les maraîchers choisissent les plus productives, les plus faciles à cultiver, souvent des variétés hybrides, souvent de type cylindrique, dit « Nantais ». La richesse variétale de la carotte n'intéresse pas encore le consommateur. Aujourd'hui, nouveau changement de cap : attrait du consommateur pour les variétés anciennes, envie de retrouver des légumes qui ont du goût, curiosité et intérêt pour des légumes qui sortent des sentiers battus... C'est le moment pour les carottes jaunes, violettes et blanches de sortir des placards ! Ainsi, les sélectionneurs tentent de répondre à ces demandes. Pour cela, ils se tournent vers les variétés anciennes qui constituent des ressources génétiques formidables. Indispensables pour l'avenir, ces ressources font aujourd'hui l'objet d'un travail en réseau. Baptisé « réseau carottes et autres Daucus », il rassemble des anciennes variétés cultivées (400 populations) et sauvages (100 populations). Avec un double objectif : permettre, quand c'est possible, l'utilisation directe de certaines de ces variétés dans l'alimentation, et favoriser la création variétale à partir de ce stock fabuleux de ressources génétiques. Sans compter que grâce au réseau, la longue histoire de la carotte, ses voyages à travers le monde, la manière dont elle a été cultivée, sélectionnée, est aussi précieusement conservée.
Il faut quinze à vingt jours à la carotte pour germer. Une fois sorties de terre, les petites plantes de carotte mettent encore quelques semaines avant de réellement démarrer leur croissance. Le jardinier doit donc veiller attentivement non seulement à arroser sa ligne de semis régulièrement, mais aussi à limiter la concurrence des mauvaises herbes qui, elles, poussent souvent plus vite. Patience et régularité dans les soins : deux qualités indispensables aux semeurs de carottes !
La carotte a besoin d'une terre meuble et profonde pour pouvoir pousser et s'épanouir. Sa racine doit pouvoir y plonger et y grossir. Mieux vaut donc préférer des terres légères et sableuses, bien ameublies en profondeur. En terre argileuse, on pourra tout de même cultiver la carotte, mais il faudra veiller à préparer le sol à l'automne, en grosses mottes, et là aussi en profondeur, avant de le reprendre au printemps, avant le semis. Bien sûr, les carottes fourchues sont parfois de grandes artistes et leurs formes étonnantes font travailler l'imagination... mais elles sont plus difficiles à éplucher !
La carotte sauvage est facile à repérer dans la nature : elle est présente spontanément en Europe, en Asie et dans le nord de l'Afrique. Cependant, attention, elle ne doit pas être confondue avec ses cousines de la famille des Apiacées (ex Ombellifères), parmi lesquelles la cigüe. Pour la distinguer, il faut repérer, au centre de l'ombelle blanche de la carotte sauvage, une fleur rouge pourpre qui n'existe que chez elle ! La carotte est une plante bisannuelle : elle produit feuilles et racines la première année et fleurit la deuxième. Mais dans les jardins, elle est cultivée comme une annuelle : on n'en voit jamais la fleur puisque c'est la racine, et elle seule, qui intéresse le jardinier.
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