Le sarrasin, le "blé noir" de nos crêpes

Amateurs de galettes bretonnes ou de crêpes, vous connaissez  la farine de sarrasin. Mais savez-vous que ce n’est pas une farine de blé, mais celle d’une plante de la famille de l’oseille et de la rhubarbe ?

©Unsplash-Jason-King

Le sarrasin n’est pas une céréale

Malgré son surnom de « blé noir », le sarrasin donne des fruits très différents des grains de blé. La graine est plutôt rouge et a une forme pyramidale. Contrairement au blé dont les grains sont tous mûrs pour la moisson, la graine de sarrasin mûrit tout au long de la croissance de la plante. L’agriculteur choisira le moment le plus propice pour récolter des graines à maturités différentes et qu’il devra ensuite trier.

Si  la forme de la graine est méconnue, c’est parce que le sarrasin est essentiellement utilisé sous forme de farine, notamment - depuis des siècles - chez les paysans les plus pauvres. Son nom le plus courant est  « blé noir ». C’est d’ailleurs ainsi qu’il est mis en avant par l’IGP, l’Indication Géographique Protégée pour la Farine de blé noir de Bretagne®. Mais il est d’un point de vue botanique plutôt une « pseudo-céréale » (1), comme le quinoa.

De bonnes raisons de manger du sarrasin

Le sarrasin est une bonne source de protéines végétales, 13 g pour 100 g, comme le  blé. Il contient tous les acides aminés essentiels à une bonne assimilation nutritionnelle. Sa teneur modérée en sucres permet de le recommander aux diabétiques. Autre propriété : le sarrasin ne contient pas de gluten, ce qui est un avantage pour les personnes allergiques, mais rend sa farine impropre à la fabrication de pain. Il est riche en magnésium et en rutine (2), cette dernière possédant des propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires, ou encore vasoprotectrices. Toutes ces caractéristiques font du sarrasin une plante à redécouvrir et à intégrer pour une alimentation saine et variée.

Les usages et les formes du sarrasin

La farine de sarrasin permet de faire des produits denses et qui ne gonflent pas à la cuisson : galettes,  desserts et pâtes en tout genre ; elle est notamment utilisée dans les nouilles japonaises. Mais le sarrasin peut aussi se consommer sous forme de grains décortiqués et grillés. C’est le fameux kasha, au goût de noisette, consommé, par exemple, en  salade. En Asie, le kasha est également utilisé en infusion : nommé Sobacha, ce thé de sarrasin est réputé pour ses effets détoxifiants et antioxydants.

Une culture écologique

Le sarrasin est une plante peu exigeante car elle est naturellement résistante à de nombreuses maladies et ne demande pas d’apports d’engrais. Par contre, il a besoin d’insectes pollinisateurs pour sa fécondation, et heureusement, car c’est une plante mellifère avec une floraison étalée sur plus de 50 jours. Les producteurs recommandent d’installer des ruches près des parcelles pour garantir la production de grains.

Il est rarement nécessaire de désherber là où le sarrasin est cultivé.  Il est même considéré comme une plante étouffante pour les mauvaises herbes car elle pousse très vite et occupe rapidement le terrain. De plus, elle produit des toxines qui empêchent les plantes concurrentes de germer.

Une plante rustique mais avec une récolte délicate

Comme la floraison et la maturité des graines sont échelonnées, la récolte peut être compliquée. Celle-ci s’effectue quand l’agriculteur considère que trois quarts des grains sont mûrs. De plus, le sarrasin a une tige cassante et craint les basses températures en début de floraison. Au final, les rendements sont très variables d’une année sur l’autre, avec un objectif moyen de 1,5 tonne à l’hectare (pour référence le blé, c’est plus de 7 tonnes et l’avoine 4,5 tonnes).

Le sarrasin est présent principalement en Bretagne, où le climat lui est favorable, mais il est cultivé ailleurs, comme en Auvergne ou en Savoie avec des usages parfois différents : aliment pour animaux, et notamment des graines pour l’oisellerie, engrais vert ou, plus original, comme plante capable de nettoyer des parcelles sales, grâce à sa capacité à assimiler des toxines présentes dans le sol.  

L’engouement pour le sarrasin va de pair avec celui d’autres « pseudo-céréales », plébiscitées en agriculture bio. Une chance pour des agriculteurs qui peuvent trouver un complément de revenu sur un marché redevenu « tendance ».

Marie Rigouzzo

(1) Le terme de «  pseudo-céréales » regroupe les graines de graminées ou d’autres plantes qui peuvent être moulues et réduites en farine et utilisées comme celles des céréales.

(2) La rutine est une vitamine qui est présente dans les pommes, les figues, la plupart des agrumes, le sarrasin et le thé vert. Elle fait partie des flavonoïdes qui ont des puissants effets antioxydants et anti-inflammatoires. On la retrouve dans des médicaments pour améliorer la circulation sanguine, réduire le cholestérol et soulager les symptômes de l’arthrite. La rutine aiderait également  le corps à utiliser correctement la vitamine C.

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