La silphie, elle a tout pour plaire !

Que ce soit pour alimenter les troupeaux ou être valorisée en méthanisation, la silphie, plante pérenne, résistante à la sécheresse et installée pour quinze ans minimum, peut, dans certaines situations, constituer une alternative au maïs.

Résistante au stress hydrique, la silphie peut nourrir les animaux d’élevage et alimenter les méthaniseurs. © Silphie France

Depuis quelques années, les sécheresses estivales se succèdent. Le manque d’eau et les températures excessives mènent la vie dure aux agriculteurs qui voient l’herbe griller, les maïs souffrir et les rendements diminuer. Ils craignent que les stocks de fourrage soient insuffisants pour nourrir les animaux pendant l’hiver. La silphie, plante très résistante à la sécheresse, serait-elle la solution miracle pour s’adapter au changement climatique ?

En France, 4000 hectares de production

Cette grande plante vivace de trois mètres de haut, aux multiples fleurs jaunes, appartient à la famille des Astéracées, comme le tournesol. Originaire des régions tempérées d’Amérique du Nord, elle est très répandue dans l’est des États-Unis et au Canada. En Europe, l’Allemagne développe la silphie depuis plus de vingt ans. Elle connaît aujourd’hui un développement exponentiel avec quelque 10 000 hectares cultivés en 2022. En France, l’espèce suscite l’intérêt de plus en plus d’éleveurs et d’agriméthaniseurs. Depuis 2018, la société vosgienne Silphie-France importe des semences allemandes de la variété ‘Abica Perfo’ et accompagne les agriculteurs qui se lancent dans cette culture. Ainsi, en 2022, plus de 4 000 hectares sont cultivés dans 67 départements.

Résistante aux aléas climatiques

La silphie perfoliée est une plante pérenne, installée pour quinze ans, voire plus. Une fois bien implantée, son système racinaire profond de deux à trois mètres lui permet de puiser l’eau dans le sol. Elle résiste donc mieux à la sécheresse qu’une espèce annuelle. La plante réclame autant d’eau qu’un maïs mais pas aux mêmes périodes. Elle pousse dès le mois de février et atteint déjà 1,70 mètre à la mi-juin pendant que le maïs, semé seulement depuis quelques semaines, a les besoins en eau élevés des plantes en pleine croissance. La silphie tolère également le gel jusqu’à - 40 degrés, les fortes pluies et les périodes d’immersion de plusieurs semaines. Une plante warrior en quelque sorte !

Peu d’intrants

Le semis de la silphie s’effectue au printemps et s’accompagne d’un apport d’engrais pour lancer la culture. Celle-ci est désherbée uniquement la première année. Ensuite, elle ne nécessite plus aucune intervention phytosanitaire, ni travaux durant toute la durée d’exploitation. Un vrai gain de temps et de charges pour l’agriculteur. Seul, un engrais minéral ou organique (fumier, digestat) est apporté au printemps, au redémarrage de sa croissance.
La plante se développe lentement au départ puis, au fil du temps, le nombre de tiges par pied (jusqu’à 80) augmente. Il faut donc attendre un an pour obtenir la première récolte. Pour compenser cette année blanche, les agriculteurs peuvent semer en même temps que la silphie, du maïs ou du sorgho qu’ils récolteront à l’automne. Cette technique a l’avantage de laisser moins de place aux mauvaises herbes entre les rangs de la jeune silphie.

Alimenter vaches et méthaniseurs

La silphie est récoltée en ensilage ou enrubannage un an après le semis. Une coupe mi-juin puis une seconde fin septembre procurent jusqu’à 14 tonnes MS/ha [1], autant qu’un maïs en moyenne. De quoi sécuriser les stocks de fourrage. Plus riche en protéines que le maïs mais plus faible en énergie, la silphie intègre la ration des bovins et d’autres ruminants. Les éleveurs affichent un fort intérêt pour alimenter les troupeaux avec la silphie.
Avec un pouvoir méthanogène proche de celui du maïs, la plante aux fleurs jaunes intéresse aussi les producteurs de biogaz. Elle est alors ensilée entre mi-août et fin septembre et offre un rendement de 15 à 20 tonnes de MS/ha.

Là où le bât blesse, c’est le coût d’implantation. Il faut compter environ 1800 €/ha de semences et d’engrais, une charge conséquente surtout si on ajoute l’absence de récolte en première année. Le calcul doit toutefois se raisonner à long terme en intégrant tous les atouts de la culture.

Sabine Huet

[1] MS : matière sèche

Comparée aux cultures annuelles, la silphie, culture pérenne, regorge d’atouts agronomiques et environnementaux : aucun travail du sol, couverture permanente qui protège les sols de l’érosion, stockage de carbone dans le sol, fertilisation azotée moindre que le maïs, réduction du lessivage hivernal, faibles besoins en eau en été, amélioration de la biodiversité des sols, attractivité pour les pollinisateurs et refuge pour le petit gibier, plante non invasive. De plus, très mellifère, elle apporte pollen et nectar aux abeilles au cœur de l’été, à une période où la nourriture se fait rare. On estime son potentiel à 150 kg de miel à l’hectare.

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