N’est pas gazon de terrain de sport qui veut !

Alors que se prépare, en France en 2023, la prochaine coupe du monde de rugby, les semenciers travaillent à enrichir leurs gammes de gazon avec des espèces résistantes au piétinement et à l’arrachement. Mais pas seulement ! Derrière un terrain bien vert, se cachent de nombreuses années de recherche pour répondre aux attentes des joueurs et des équipes d’entretien.

La résistance au piétinement et à l’arrachement est un critère essentiel pour le choix d’un gazon de terrain de sport. © Pixabay-Patrick-Blaise

Les mêlées des rugbymans ne leur font pas peur. Pas plus que les crampons des footballeurs. Elles sont pourtant fragiles et font l’objet du plus grand soin. Elles, ce sont les pelouses des stades. Qu’elles appartiennent aux grands clubs nationaux ou aux communes les plus rurales, leurs semis, entretiens, tontes et regarnissages sont pris au sérieux. Car n’est pas semence de gazon qui veut ! Il faut montrer patte blanche... ou plutôt brins verts. Les sélectionneurs dédiés à cette gamme de semences en savent quelque chose. « Premier atout indispensable pour ces terrains engazonnés : la résistance au piétinement et à l’arrachement. Mais, de plus en plus, nous regardons également de près la sensibilité des variétés à la sécheresse. Les derniers mois nous le montrent : ce critère va devenir incontournable car l’arrosage des pelouses peut vite alourdir la facture des dépenses des collectivités », explique Luc Bourigault, directeur opérationnel de « Les Gazons de France » (1), une filiale du semencier RAGT. 

De nombreux critères de choix

Pour Oriane Bouty, cheffe produits gazons chez Barenbrug, les critères de choix sont nombreux : « le gazon doit s’installer rapidement, être résistant aux différents stress, parmi lesquels la sécheresse et les fortes températures, être facile d’entretien et esthétique. » Tout cela à la fois.
La résistance des espèces aux nombreuses maladies du gazon fait aussi partie des caractéristiques prises en compte. Les terrains étant irrigués et souvent peu ventilés car installés dans des enceintes abritées, ils sont plus sensibles aux maladies. Les équipes d’entretien des stades apprécient aussi une pelouse qui s’installe vite mais qui, ensuite, pousse lentement pour limiter les passages de tondeuses. Autre critère recherché : la finesse des brins pour faciliter le déplacement des joueurs, et du ballon !

Un mélange de plusieurs espèces ou variétés

Force est de constater qu’il est difficile, pour une seule espèce ou variété, de posséder tous ces atouts. Aussi, un gazon est toujours un mélange.
Pour notamment répondre à la problématique sécheresse, Jean-Marc Lecourt, directeur de DLF, explique que les semenciers associent le ray-grass anglais tétraploïde (4n), qui s’installe rapidement, à d’autres espèces telles que la fétuque élevée ou le pâturin des prés, plus résistantes.
La fétuque élevée monte en puissance au sein des gammes car elle résiste bien au manque d’eau. Même en situation de stress hydrique prolongé, elle est capable de reverdir dès le retour des premières pluies. De même, cette graminée s’enracine profondément : elle fait donc preuve d’une bonne résistance à l’arrachement et au piétinement. « Le temps où les feuilles étaient peu esthétiques, car un peu épaisses, est révolu, se félicite Luc Bourigault. Notre travail de sélection a payé. Désormais, les fétuques élevées mises sur le marché présentent, elles aussi, un feuillage fin. » D’ailleurs, les gazonnières qui produisent les gazons de placage, ne s’y trompent pas. Pour aboutir à un enracinement rapide et profond, elles optent pour des mélanges ray-grass et fétuque élevée.

Une autre espèce, jusqu’alors marginale, a attiré l’attention des responsables de stades : le cynodon dactylon (appelé couramment « chiendent »), résistant à la sécheresse et aux fortes chaleurs, plutôt pour les régions du sud de la France. Comme l’espèce entre en dormance pendant la période hivernale, elle convient moins aux terrains de sport pour lesquels les matchs se déroulent en hiver.

Un entretien facile, une priorité

Pour faciliter l’entretien des stades, et notamment le désherbage, l’enjeu est de semer dense pour ne pas laisser de place aux mauvaises herbes. La rapidité de la levée est aussi un atout important. Un impératif à l’heure où le recours aux produits phytosanitaires est de plus en plus réglementé, y compris dans les enceintes sportives. Là encore, le choix des espèces est capital. La hauteur de la tonte a également son importance. Elle doit être adaptée à chaque type de sport. Si, en football, l’enjeu est de faire glisser le ballon, le joueur doit, lui, rester sur ses appuis. L’apport de silice sur les gazons est une bonne solution pour limiter les glissades. Les exigences en termes de performances et de résistances des pelouses sont de plus en plus grandes. De ce fait, les variétés évoluent sans cesse pour répondre à ces attentes. La qualité du terrain fait partie intégrante de la réussite d’un match. Ce ne sont pas les joueurs qui diront le contraire !

Carole Loiseau


(1)  « Les Gazons de France » ont, le 24 mai 2022, signé un partenariat avec la Fédération française de rugby, qui en fait le fournisseur officiel de semences de gazon et de produits de nutrition des plantes pour les quatre terrains enherbés du Centre national de rugby de Marcoussis (91), pour une durée de trois ans.

Depuis le 1er janvier 2017, les collectivités territoriales et les établissements publics ne peuvent plus utiliser de produits phytosanitaires conventionnels pour l’entretien des espaces verts, des forêts, des voiries et des promenades accessibles au public. Cette interdiction, qui émane de la loi Labbé, s’est renforcée le 1er juillet 2022. Depuis cette date, sont également concernés les espaces privés à usage d’habitation et les lieux à usage collectif. En revanche, les terrains de sports sur gazon, les hippodromes et les golfs peuvent, eux, recourir aux produits phytosanitaires conventionnels jusqu’au 1er janvier 2025.

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