Sauvegarder les populations de carottes

Le réseau « Carottes et autres Daucus »

Le réseau regroupe des sélectionneurs privés, l'interprofession par le biais du CTIFL (Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes), la station d'expérimentation Pôle légumes Région Nord, le Geves (Groupe d'Étude et de Contrôle des Variétés et des Semences), l'enseignement supérieur (AgroCampus Ouest) et un taxonomiste (Via Apia).

L’objectif de ce réseau

Créé en 1998, le réseau « Carottes et autres Daucus » conserve à ce jour 400 lots de populations cultivées et 100 lots de populations sauvages. L'objectif est de conserver la diversité existante de l'espèce carotte. Il arrive parfois qu'après radiation du catalogue, certaines variétés disparaissent ; c'est arrivé une ou deux fois pour la carotte. Le travail du réseau est une démarche active. Le but n'est surtout pas de garder des échantillons de graines en frigos ! Au contraire, il faut que l'ensemble des variétés de carottes ayant existé soit maintenu et puisse être disponible, avec des lots de graines en quantité et qualité suffisantes. C'est toujours la diversité qui guide l’action. La France est ce qu'on appelle « un centre de diversification secondaire » de la carotte. Beaucoup de maraichers puis les entreprises semencières, au fil du temps, ont participé à la sélection de cette espèce, ont adapté des variétés aux régions ou conditions de culture. Cela donne une richesse formidable !

Le réseau travaille toujours dans une optique de diversité et s’intéresse aux populations sauvages

Un travail important a été réalisé sur les populations cultivées ; à présent, le réseau s’attaque aux populations sauvages de carottes. Les sites possibles de présence de carotte sauvage sont d'abord inventoriés. La collecte de graines est faite sur ces sites, ensuite, des tests de résistance aux maladies sont réalisés, la croisabilité de ces taxons (groupe de plantes ayant des caractères communs) et l'intérêt pour la création variétale sont vérifiés. Aujourd'hui, ce travail a porté ses fruits : la diversité sauvage en France a une bonne représentativité. Le réseau conserve un lot de graines de chacune de ces populations sauvages, dont certaines sont menacées, car des sites en danger sont connus... Le réseau se met en relation avec les conservatoires botaniques qui assurent la protection de certains espaces : il faut sauvegarder ces populations qui sont menacées à terme, par exemple, par des aménagements côtiers.

L’accessibilité du matériel conservé par le réseau

Les ressources génétiques conservées par le réseau sont réparties en deux niveaux de collection : la collection dite nationale, qui correspond à l'engagement patrimonial de la France, qui comprend du matériel français et qui peut être distribué. Cela correspond à environ la moitié des lots conservés. Vient ensuite la collection « réseau » : il s'agit souvent de populations qui ne sont pas bien typées, ou alors pas d’origine française. Elles ne sont accessibles qu'aux membres du réseau.

L’utilisation des ressources génétiques du réseau

Les ressources génétiques du réseau sont le plus souvent utilisées par des sélectionneurs, des semenciers. Parfois aussi des amateurs ou des maraîchers, qui cherchent des variétés adaptées à un mode de culture particulier. Il est arrivé qu'une association de maraîchers en agriculture biologique souhaite tester une variété donnée : dans ce cas le réseau fournit les lots demandés. Mais il ne peut pas fournir des graines à tous les particuliers qui le demanderaient. Si une variété a un intérêt pour l'agriculture ou pour les jardiniers amateurs, le réseau essaye de promouvoir sa ré-inscription au catalogue.

Le financement des activités du réseau

L'activité générale du réseau est financée par les membres eux-mêmes. Chacun y trouve un intérêt ! Il y a une activité de sélection importante, en France, sur cette espèce. Ce n'est pas le cas pour d'autres espèces comme le haricot ou l'oignon qui se retrouvent orphelines, sans réseau de conservation de leurs ressources génétiques. Le réseau a aussi d'autres sources de financement : dernièrement, par exemple, il a répondu à un appel à projet du Ministère de l'agriculture, qui a permis de mettre l'accent sur les populations sauvages. De manière plus générale, la question du financement des actions pose le problème de qui est propriétaire des ressources génétiques. Au sein du réseau, de longues discussions sur ce sujet sont souvent menées.
Les partenaires participent tous aux essais de caractérisation. Ces essais sont réalisés en un même lieu, qui tourne chaque année. Les derniers ont été faits au Geves à Brion, près d'Angers. Les partenaires jugent ensemble la variété étudiée pour arriver à une décision commune : faut-il la conserver ou non ? Pour quelle raison ? L’objectif n’est pas de maintenir absolument tous les lots. Il peut arriver qu'un lot ne corresponde plus du tout au type, qu'il soit trop hétérogène. A l'inverse, il peut arriver qu'un lot ne corresponde pas au type mais qu'il soit original, qu'il ait un intérêt du point de vue de la diversité. Dans ce cas, il est conservé. Chaque membre du réseau est spécialiste d'une ou plusieurs espèces et tous les membres se complètent. Les partenaires participent aussi à l'effort de multiplication et chacun multiplie une ou deux accessions (plantes qui correspond à une ressource génétique) par an. Des actions de promotion du travail sont réalisées et ce qui est positif avec le fonctionnement en réseau, c'est que les efforts de tous les partenaires sont mutualisés.
Une base de données de gestion de la collection (origine, quantité et taux de germination, multiplication) a été mise à jour et une base de données de description doit être mise en place. Le travail se fait en en deux étapes : la caractérisation puis l'évaluation des variétés. La caractérisation est descriptive : il est indiqué la conformité ou non du lot par rapport au type, ses principales caractéristiques morphologiques. Lors de l'étape de l'évaluation, des critères agronomiques et d'utilisation des variétés sont observés. Ce sont des informations qui permettent à l'utilisateur de choisir le lot qui l'intéresse, en fonction de son mode de culture et de ses objectifs propres : c'est par exemple une éventuelle résistance à la mouche de la carotte, la couleur de la racine, qui peut aller de l'orange, au violet, en passant par le blanc ou le jaune... Aujourd'hui, ce n’est que le début de cette étape d'évaluation. Jusqu'à présent, le but a été de mettre à jour la représentativité française de la diversité en carotte.
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