Le Haricot au fil de l'histoire

Le haricot, c’est d’abord la vision traditionnelle, dans un potager, de plants grimpants sur des tuteurs de noisetier ou sur des filets à ramer. A la fin du printemps, ses tiges fleurissent, puis ses fleurs se transforment en gousses après la pollinisation. Lorsqu’elles sont cueillies fraîches avant leur maturité, ce sont les haricots verts ou jaunes, appelés aussi haricot beurre ou mange-tout. A maturité, les gousses ne sont plus mangeables, on consomme alors les graines fraîches ou sèches.

Dans les cales des navires des conquistadors

Apparu il y a environ 500.000 ans, le haricot serait né en Equateur puis se serait diversifié au Mexique et dans les Andes (Pérou, Bolivie, Argentine). La forme sauvage a été domestiquée vers 6.000 av. JC. Sa culture a eu une importance remarquable dans les civilisations indiennes. Il faudra toutefois attendre les grandes explorations et la conquête du Nouveau Monde pour que les premiers haricots atteignent les côtes de l'Europe. Christophe Colomb les remarquera d'abord à Cuba, Cabeca de Vaca les trouvera en Floride en 1528 et Jacques Cartier, à l'embouchure du Saint-Laurent en 1535. En Europe, le haricot fut d'abord cultivé pour ses grains, le haricot vert frais ne fut consommé qu'à partir de la fin du XIXe siècle en Italie. Il est devenu depuis un élément de la cuisine traditionnelle.

Et le haricot perdit son fil...

L’homme a su utiliser la diversité génétique abondante que lui offrait le haricot depuis ses modestes débuts en Amérique latine. Son histoire est ponctuée d’anecdotes. En 1872, Gabriel Chevrier, agriculteur à Bretigny-sur-Orge (Essonne), remarque que les graines de haricots restent vertes même après séchage en les récoltant avant maturité. Le flageolet vert était né ! Les sélectionneurs ont progressivement développé des variétés naines plus faciles à cultiver mais aussi à récolter. Toutes les variétés d’avant 1920 possédaient un fil. La volonté de consommer du haricot en légume vert a incité les sélectionneurs à éliminer ce fil et rendre la gousse aussi fine que possible.

La France, reine du haricot

La France produit annuellement quelques 350.000 tonnes de haricots. Le haricot est le premier légume vert consommé en France, surtout en conserve et en surgelé. La France est devenue le premier exportateur mondial de haricot en conserve et le troisième en surgelé. 45.000 tonnes de haricots grains sont produits chaque année en France, auxquelles il faut ajouter une dizaine de milliers de tonnes de coco de Paimpol, de haricot tarbais et autres variétés régionales qui sont consommées directement en frais ou en sec. Le haricot fait largement partie de notre patrimoine national.
Le nom de « haricot » est une innovation française. Son origine reste controversée. Le nom proviendrait du plat « haricot de mouton », connu dès le Moyen-Age et préparé avec des navets. Mais le terme « haricot » n’est pas le nom du légume. Il viendrait du vieux français « haligoter » ou « harigoter » qui, au XIIème siècle signifie « déchiqueter ». Il s’agit d’un plat avec de la viande découpée en morceaux. Par extension, ce mot a été attribué au légume consommé avec cette viande (généralement du mouton). L’une des premières mentions du mot haricot, dans son acception actuelle, date de 1627, chez les vignerons de Montreuil.
En présentant les plantes cultivées régionales dans un potager ouvert au public, le Centre d’études et de recherches sur l’environnement (Ceres), installé dans le Domaine de la Grange-la-Prévôté, à Savigny-le-Temple (Seine-et-Marne), entend rendre leur histoire vivante. Plusieurs parcelles du potager du Ceres sont dédiées aux haricots : de la pergola à l'entrée, qui présente cinq espèces de haricots sauvages jusqu'à l'autre bout du potager, qui montre le haricot d'industrie, toute la saga du haricot est passée en revue. « Présenter autant de variétés de haricots dans un potager, c’est aussi montrer que les goûts évoluent, mais qu’on peut retrouver les saveurs d’autrefois, explique son directeur, Gilles Debarle. Ce n’est pas parce qu’on consomme des haricots extra-fins que l’on doit oublier les autres variétés dont certaines ont un goût unique. Un potager doit aussi faire le lien avec les jardiniers amateurs de plus en plus nombreux qui sont conscients de l’intérêt des variétés locales ». Le Domaine de la Grange-la-Prévôté abritera prochainement le Centre régional des ressources génétiques d’Ile-de-France.
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