La relance du Haricot Tarbais : c'était toute une aventure !

Jean-Marc Bedouret - Président - Coopérative du Haricot Tarbais

Qui est à l'origine de la renaissance du Haricot Tarbais ?

Jean-Marc Bedouret - Président - Coopérative du Haricot Tarbais
Au départ, en 1986, une douzaine d'agriculteurs, dont je faisais partie, décident de relancer le Haricot Tarbais, produit dans la région depuis le XVIIIème siècle. C'était toute une aventure ! L'idée était d'offrir une alternative aux producteurs, parfois en difficulté avec les filières classiques de céréales, lait ou viande, grâce au développement d'une filière qualité. Dès le départ, le plus important pour nous était de protéger le nom « Haricot Tarbais », pour qu'il ne puisse désigner que notre haricot local, adapté à notre terroir, à notre climat. A nos yeux, c'était absolument indispensable pour construire une filière et apporter une dynamique départementale. Nous avons donc choisi de déposer un dossier pour obtenir une Indication Géographique Protégée (IGP). Mais ça n'est pas si simple ! Pour avoir une IGP, il fallait que notre haricot obtienne un label qualité, soit un Label rouge, soit un Certificat Conformité Produit (CCP), et nous avons choisi de nous orienter vers le Label rouge. Très vite, dès 1986, nous avons mis en place des expérimentations de terrain, pour améliorer les techniques culturales. Nous avons fait des essais pour remplacer les tuteurs en maïs par des filets, nous avons lancé une étude de marché. Et surtout, nous avons mis en œuvre un travail très important autour de la semence, pour améliorer la qualité du produit et répondre aux exigences du Label rouge.

En quoi a consisté ce travail au niveau de la semence ?

Nous avons commencé par collecter des semences dans les fermes. Dans la région, si la production de haricot a largement périclité depuis les années 1960, les familles ont continué à le cultiver dans les jardins, pour l'auto consommation, et le haricot est resté un élément important de l'alimentation paysanne locale. Quant à la semence, elle a toujours été transmise de génération en génération jusqu'à aujourd'hui. Par tradition, personne ne s'échangeait la semence, chaque famille conservait jalousement la sienne ! C'est ainsi que nous avons collecté 400 échantillons. Ensuite, en collaboration avec l'Inra, une variété a été sélectionnée à partir de toutes ces semences. Cela a pris du temps puisque la variété, que nous avons appelé « alaric », a été enregistrée au catalogue officiel en 1998. Pour fixer cette variété, nous nous sommes basés sur différents critères, comme la précocité, l'homogénéité, la qualité gustative... Ce travail a été essentiel pour obtenir le Label rouge. Aujourd'hui encore, toutes les variétés de ferme sont précieusement gardées au conservatoire botanique de Midi-Pyrénées. Elles constituent un réservoir dans lequel nous pouvons puiser si nous avons besoin de régénérer la semence. Justement, en 2008, la variété « lapujole » a été créée par mesure de sécurité, pour éviter tout problème de dégénérescence de la semence, et aussi parce qu'elle est résistante à la maladie de l'anthracnose.

Il est donc obligatoire d'utiliser les variétés «alaric» ou «lapujole» pour produire du Haricot Tarbais Label rouge et IGP. Ce sont toutes les deux des semences certifiées . Qu'es-ce-que cela signifie ?

La certification d'une semence potagère n'est pas obligatoire, mais nous avons préféré la demander. Cela permet d'assurer à notre semence une meilleure qualité, car les contrôles sont plus sévères. Comme nous sommes une petite structure, cela nous permet aussi d'être plus crédible vis-à-vis de nos partenaires.

Aujourd'hui, qui produit la semence pour le Haricot Tarbais et comment ?

La coopérative du Haricot Tarbais est l'obtenteur et le mainteneur des variétés « alaric » et « lapujole ». C'est donc elle qui est responsable de la production de semence, pour tous les agriculteurs qui font partie de la démarche IGP, coopérateurs et indépendants. Cette production est réalisée en deux étapes. Tout d'abord, c'est le maintien de la variété qui nous importe, ou plus exactement le maintien des caractéristiques pour lesquelles nos variétés ont été inscrites au catalogue. Dans une serre de 600m2, nous produisons la base de la semence : nous y sélectionnons les pieds qui sont le plus en conformité avec la description du catalogue. Dans une deuxième étape, nous fournissons cette semence à deux agriculteurs, qui sont chargés de la multiplier sur leur ferme. En tant que multiplicateurs de semence, eux aussi ont un cahier des charges bien précis à respecter. Car c'est à partir de leur production que tous les agriculteurs de la zone IGP peuvent cultiver du Haricot Tarbais.
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