La permaculture prend ses marques

On entend de plus en plus parler de permaculture, mais sans trop savoir ce que cela signifie. Contraction anglosaxonne de « permanent » et de « culture », est-ce une variation de l’agriculture biologique, de l’agroécologie, ou une tout autre manière de pratiquer l’agriculture ?

Parcelle menée en permaculture. ©iStock-Jekaterina Sahmanova

La France a été pionnière en agroécologie, qui recouvre un ensemble de méthodes de production agricole respectueuses de l’environnement. Toutefois, l’agroécologie n’implique pas obligatoirement l’adoption des cultures certifiées biologiques (AB) qui, elles, répondent à un cahier des charges particulier.

Un courant « engagé »

En effet, la permaculture n’est pas seulement une nouvelle pratique culturale. Elle se revendique comme une démarche éthique, qui préserve le capital naturel (eau, sol, biodiversité) et qui garantit une activité viable pour les agriculteurs. La permaculture a pour vocation d’atteindre une efficacité énergétique maximale dans les modes de production, de commercialisation et de réutilisation des déchets. Elle a pour base l’agriculture biologique, mais tout le système de production est remis en question, et pas uniquement l’usage des engrais ou des produits de protection des plantes. Elle inclut la gestion de la forêt, des haies, le développement de la polyculture, des associations culturales et horticoles mais aussi la présence des animaux. L’objectif est l’autonomie alimentaire et la production raisonnée, avec une rémunération suffisante de l’agriculteur.
Pour autant, cet objectif est-il atteint ? La permaculture a d’abord été testée sur de petites parcelles, par des jardiniers amateurs ou des petits producteurs. L’idée est d’organiser la parcelle par rapport aux besoins, à la disponibilité en eau, à l’environnement proche, pour installer les conditions optimales de production. Finies les rangées linéaires de poireaux et de carottes ! Les cultures peuvent être installées en rond ou suivre des courbes de niveaux, associées à des arbres et des animaux… Le jardin ou l’unité de production est donc pensé « à la carte » en amont de sa création et la permaculture recueille de plus en plus d’adeptes chez les jardiniers.

Naissance d’un réseau

Ensuite, la permaculture a gagné de plus grandes surfaces. En 2014, un jeune agronome Maxime de Rostolan lance le projet « Fermes d’avenir » pour soutenir le développement de l’agroécologie en France, tout en s’inspirant le plus possible de la permaculture. La première micro-ferme expérimentale ouvre alors ses portes en Touraine. Elle a permis de tester la viabilité économique du projet, sachant que l’ambition n’est pas seulement la pratique de la permaculture pour le maraîchage, mais aussi la transformation et la distribution locales des productions, tout en créant des emplois pérennes.
Depuis, le réseau « Fermes d’avenir » s’est étoffé, offre des formations et développe des projets avec les pouvoirs publics, comme le projet « Sésame » dans l’Essonne. Le réseau parle désormais davantage d’agroécologie. La permaculture concerne essentiellement le maraîchage en circuit court.

La permaculture, un modèle agricole résilient ?

Pour ses fondateurs, la permaculture est un véritable engagement citoyen, une réponse pertinente au gaspillage et à la surconsommation d’énergie fossile en agriculture. Elle peut ainsi s’avérer très utile pour faire face aux conséquences du réchauffement climatique. 
Cependant, elle doit trouver des réseaux de production, de distribution et de vente adaptés à son modèle économique. Des projets se montent partout en France et font appel régulièrement au financement participatif. 
La permaculture attire des jeunes - et des moins jeunes - en reconversion professionnelle. Le dernier baromètre Agreste 2021 (1) constate que les micro-fermes sont dirigées par des agriculteurs plus jeunes que la moyenne et par davantage de femmes.  
Peu d’études existent néanmoins sur la rémunération des agriculteurs en permaculture, essentiellement des maraîchers, avec quelques données la situant autour du Smic. Le développement de la permaculture est, par ailleurs, souvent associé à celui de l’écotourisme et les formations axées sur la vente de produits transformés à la ferme… générant ainsi des revenus complémentaires. Les structures agroécologiques peuvent être de taille plus importante, à l’instar du réseau « Fermes d’avenir », avec des possibilités d’embauches à la clef. 

Un pacte de confiance plutôt qu’un cahier des charges

Actuellement, il n’existe pas de label « permaculture » reconnu, comme il en existe en « bio ». Ce sont souvent à travers les circuits courts que les consommateurs découvrent la permaculture et l’adoptent aussi dans leurs jardins. Elle redonne des lettres de noblesse au maraîchage et s’inscrit pleinement dans la recherche d’une agriculture durable et d’un pacte de confiance et d’engagement éthique avec les agriculteurs. 

Marie Rigouzzo

(1) Agreste : statistique, évaluation et prospective agricole du ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.
 

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