L'agriculture régénératrice : l'agriculture de demain ?

Difficile de s’y retrouver dans toutes les nouvelles pratiques agricoles ! Agroécologie, permaculture, agriculture de conservation, et maintenant agriculture régénératrice… Affaire de définitions, certes, mais pour quelles pratiques, avec quels acteurs et pour quels résultats ? 

Le maintien d'un couvert végétal est un des axes majeurs de l'agriculture régénératrice. © SEMAE- Julien Greffier

Selon le ministère français de l’Agriculture et celui de la Transition écologique, le changement climatique s’accélère et, aujourd’hui, l’agriculture est responsable d’environ 19 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) et consomme 45 % des ressources en eau disponible sur le territoire métropolitain. Pour les promoteurs de l’agriculture régénératrice, l’agriculture conventionnelle dégraderait la qualité des sols, diminuerait la biodiversité et l’eau disponible. 
L’agriculture régénératrice, qui n’a pas de cahier des charges spécifique, entend favoriser la santé des sols (les « régénérer ») pour développer une agriculture résiliente au changement climatique, tout en captant davantage de carbone pour diminuer les GES. Elle s’affiche donc comme une agriculture de transition « à la carte » vers une agriculture « bas carbone » et durable.

Des pratiques qui convergent vers un sol « en bonne santé »

Le sol est le pilier central dans les pratiques d’agriculture régénératrice grâce à ses propriétés de rétention d’eau. Or, le labour peut parfois « lessiver » les sols et rendre l’irrigation inefficace. De plus, afin d’enrichir la vie organique des sols, l’usage d’intrants et de pesticides est aussi limité. 
Les techniques culturales retenues sont donc le travail superficiel du sol, l’utilisation d’engrais et de pesticides respectueux de l’environnement, le maintien d’un couvert végétal, la lutte contre l’érosion en installant des bandes enherbées ou encore des brise-vents… qui favorisent la biodiversité. La diversité des espèces cultivées, la polyculture, l’agroforesterie, l’élevage associé sont donc encouragés. 
 

Un mouvement qui implique aussi les éleveurs

D’ailleurs, un producteur de produits laitiers, à forte notoriété, a lancé une stratégie d’agriculture régénératrice destinée aux éleveurs avec pour objectif de protéger les sols et d’assurer le bien-être animal en accompagnant techniquement les agriculteurs. Ainsi, Miimosa, une plateforme de financement participatif, associé au « Fonds Danone pour l'Écosystème », présente différents projets (1), où chaque éleveur engagé s’attache à diminuer l’empreinte carbone de son élevage d’au moins 5 %. 

Une recherche active

Appréhender la santé des sols, c’est aussi un vaste et nouveau champ de connaissances pour les chercheurs. L’Inrae (2) dispose d’équipes dédiées à la caractérisation biologique des sols, à leurs interactions avec la plante et au stockage du carbone. L’étude du microbiote (microorganismes du sol) s’avère complexe, mais la génétique aide à comprendre les interactions (positives ou négatives) entre les plantes, le sol et les animaux, afin de maximiser les bénéfices mutuels.
C’est un nouveau champ de recherche pour la protection des plantes, car il est avéré que certains écosystèmes favorisent l’immunité des plantes, voire les protègent des bioagresseurs.
 

Des acteurs industriels et financiers

Mais ce qui est aussi novateur, c’est l’intérêt que ce type d’agriculture a pu générer dans des secteurs à priori très éloignés : celui de la finance et de l’industrie. Plusieurs fonds d’investissement proposent à leurs clients des portefeuilles dédiés à l’agriculture régénératrice. Des logiciels de modélisation à destination du secteur agroalimentaire existent aussi, comme celui développé sur la ferme Hectar, co-fondée par Xavier Niel, sans oublier le financement participatif… 

L’agriculture durable, au cœur d’enjeux politiques et économiques

Si l’agriculture régénératrice est un mouvement mené par des agriculteurs engagés pour la résilience de l’agriculture, d’autres acteurs dans les industries (agroalimentaire, textile, cosmétique…) se mobilisent. Ce qui peut faire la force de l’agriculture régénératrice ou lui donner un vernis « marketing ».
Mais le sol a de toute façon encore beaucoup à nous apprendre, car il a été curieusement « délaissé » d’un point de vue technique ces dernières décennies. L’agriculture régénératrice sera certainement source de connaissances et de pratiques qui pourront être adoptées par tous les agriculteurs, surtout si le bilan carbone s’avère positif ! 

Marie Rigouzzo


(1) https://agriculture.danone-lait.com/fr/projects
(2) Inrae : Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement

 

Présenté en octobre 2022, le « demo center agricole » du campus Hectar (co-fondé par Xavier Niel, fondateur du fournisseur d'accès Internet connu sous la marque Free), géré par le cabinet McKinsey, a de quoi surprendre. Il consiste en un atelier immersif qui s’adresse à tous les acteurs du secteur agroalimentaire en réflexion sur la transition agricole et l’impact carbone en particulier, et qui prend la forme d’un simulateur d’agriculture régénératrice. Il intègre des modélisations numériques sur les pratiques, les données du terrain, les tendances consommateurs, l’optimisation des circuits de distribution et de vente, les solutions technologiques et les besoins des agriculteurs.

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