Les anciennes variétés de légumes ont-elles toutes disparu ?

C'est dans l'air du temps. Les jardiniers sont de plus en plus nombreux à vouloir redécouvrir et cultiver d'anciennes variétés aux noms parfois si poétiques : oseille commune de Belleville, choux pommés, haricot Lingot, courges bouteille... Le jardinage productif fait place au jardin plaisir, et la découverte de formes, de couleurs, de saveurs oubliées en font partie. Mais l'on entend parfois dire que les anciennes variétés ont toutes disparu. Qu'en est-il vraiment ?

La biodiversité des plantes cultivées s'enrichit

Pour les espèces cultivées, l'action de l'homme a contribué à enrichir la biodiversité. En effet, l'homme a d'abord identifié des plantes sauvages comme plantes alimentaires (ou médicinales), il les a entraînées dans son sillage, les a acclimatées à des milieux très divers, et les a domestiquées. De nombreuses populations locales en sont issues. Plus récemment, les sélectionneurs ont encore enrichi cette biodiversité en créant sans cesse de nouvelles variétés. Chaque année, plus de 500 variétés, potagères et agricoles, sont inscrites au catalogue des espèces et variétés.

Une priorité : conserver toutes les anciennes variétés

Pour certains, les variétés anciennes peuvent paraître dépassées par des variétés récentes offrant de nouvelles qualités. En fait, les scientifiques, les chercheurs, les collectionneurs veulent conserver toute la biodiversité... et sont très attentifs à la préservation des anciennes variétés. Pourquoi ? Parce que l'ensemble des variétés constituent un réservoir dans lequel l'homme puise pour créer de nouvelles variétés, résistantes à un parasite ou ayant une caractéristique particulière. Les sélectionneurs ont été les premiers en France à collectionner des variétés, et à maintenir et enrichir ces collections. Ils participent à des réseaux de ressources génétiques qui permettent de développer la conservation et les échanges.

Conserver : un métier d'expert

La conservation des ressources génétiques nécessite une gestion stricte. En effet, pour préserver les qualités d'origine d'une variété, il est indispensable de la répertorier et de décrire ses caractéristiques de façon précise. Il faut ensuite savoir préserver ces caractéristiques lors de la nécessaire reproduction des plantes. En France, la coordination de ce travail est assurée par le Bureau des ressources génétiques (BRG), qui participe aux programmes internationaux de coopération. Le BRG s'appuie sur une trentaine de réseaux organisés par espèce (maïs, carottes, betteraves, céréales à paille, colza...) qui regroupent notamment les entreprises de sélection et les instituts de recherche publics. Dans le monde, la FAO a recencé plus de 1470 collections de graines et de plantes, conservées dans des banques de gènes, réparties à travers 150 pays. On y dénombre 5,4 millions de spécimens de plantes cultivées.
L'homme s'est d'abord nourri de cueillettes. Puis, pour avoir toujours de la nourriture à portée de main et en quantité suffisante, il s'est mis à cultiver. Le haricot a été dès le départ l'une des plantes les mieux adaptées à la culture et à la conservation. Mais les premiers types de haricot présentaient une graine plus petite qu'un grain de riz ! Les croisements réalisés entre plantes par les insectes ont donné des variétés de grains de taille variable et l'homme a naturellement choisi de conserver et de reproduire celles à plus gros grains. En quelques milliers d'années, on est passé de grains de 0,05 gramme à des haricots cultivés dans le Nord ou en Vendée dont les grains pesaient 0,5 gramme. Partout où il a été cultivé par l'homme, le haricot a donné naissance à une grande variété de populations et variétés. La sélection moderne a accéléré ce processus de création avec l'utilisation de ressources génétiques étendues. C'est ainsi que le catalogue français des espèces potagères présente plus de 200 variétés de haricots nains.
Le catalogue officiel des espèces et variétés répertorie les variétés, ce qui évite que des variétés différentes ne soient vendues sous le même nom, ou qu'une même variété ait des appellations différentes. Il clarifie la vente et protége les acheteurs. Toute nouvelle variété doit être inscrite au catalogue officiel pour être commercialisée. Pour pouvoir l'inscrire, il faut prouver que la variété est vraiment nouvelle et qu'elle garde bien dans le temps ses qualités d'origine.
1565 variétés de tomates sont inscrites au catalogue européen ou sur la liste des variétés anciennes et sont donc commercialisables en France, tandis que des milliers de variétés, de populations et de cultivars de tomates sont conservés par les entreprises de semences. Pour la carotte, espèce historiquement développée en France et en Europe, plus de 400 variétés sont conservées par les semenciers et 500 sont inscrites au catalogue et commercialisables.
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