Les couverts végétaux, couteau suisse de l'agriculture

Les couverts végétaux, appelés aussi plantes de services, apportent une multitude de bénéfices à l’agriculture, notamment environnementaux. Ils contribuent à la protection des sols et de l’eau et favorisent la biodiversité. Mais de quoi parlons-nous ?

Un couvert d'interculture multi-espèces peut produire beaucoup de biomasse. © Sabine Huet

Les couverts végétaux sont cultivés entre deux cultures principales. C’est par la directive européenne dite « nitrates » (1), qui impose de ne pas laisser les sols nus pendant l’hiver dans les zones vulnérables, que les couverts végétaux sont arrivés dans les exploitations agricoles. Ils donnent également accès au « paiement vert », une aide de la Politique agricole commune. 
Conscients des bienfaits des couverts végétaux sur les sols, les agriculteurs ont fait de cette contrainte réglementaire un atout. De fil en aiguille, ils se sont aperçus qu’ils rendaient un tas de services agronomiques, environnementaux et économiques.  Ainsi ils peuvent élargir leur utilisation à bien des situations. À tel point que l’on parle maintenant de « plantes de service ».
Les plantes de service peuvent être cultivées avant, pendant ou après la culture principale, dans la même parcelle ou à proximité, de manière temporaire ou permanente. Elles ne sont pas destinées à être récoltées, même si cela reste possible. Leur appellation change, en fonction de leur durée d’implantation ou du service qu’elles apportent.

Cultivés entre deux cultures

Les couverts d’interculture sont des plantes de services cultivées entre la récolte d’une culture principale et le semis de la suivante, par exemple entre un blé récolté en juillet et un maïs semé en mai. Ces couverts limitent l’érosion du sol et le ruissellement des pluies en surface, ils dynamisent la vie du sol et l‘enrichissent en humus. 

Les plus connus sont les cultures intermédiaires pièges à nitrates (Cipan) dont la fonction est de retenir les nitrates et d’éviter qu’ils ne soient lessivés vers les cours d’eau. Ils sont semés juste avant ou après la moisson et sont détruits par un passage d’outils (herse, rouleau), par le gel ou avec un herbicide. Ils restituent alors les nitrates captés, disponibles pour la culture suivante. Les espèces Cipan les plus courantes sont les moutardes, l’avoine rude, les radis et la phacélie. Le nyger, le moha, le sarrasin, le tournesol et les légumineuses peuvent aussi faire partie des mélanges.

Les engrais verts ont pour rôle principal de fertiliser la culture suivante. Ce sont souvent des mélanges riches en légumineuses (trèfles, vesce, pois fourrager, féverole) qui fixent l’azote de l’air. Ils structurent le sol et l’enrichissent en nutriments azotés.

À l’inverse des Cipan et des engrais verts qui retournent entièrement au sol, d’autres couverts d’interculture sont récoltés. C’est le cas des dérobées fourragères, fauchées pour nourrir les animaux. Les espèces sont choisies pour leur productivité et leur valeur alimentaire : ray-grass d'Italie, trèfles, colza, moha, avoine, vesce.

Quant aux cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive), elles sont destinées à la méthanisation. Avoine, sorgho, tournesol, triticale, trèfle ont un fort potentiel méthanogène et produisent beaucoup de biomasse.
 

De la bonne compagnie

Les plantes de services peuvent aussi être des plantes compagnes, c’est-à-dire semées en même temps que la culture principale. L’exemple le plus répandu est le colza associé à de la féverole. Cette légumineuse occupe l’espace entre les rangs de colza et permet de limiter les désherbages. Elle perturbe aussi les insectes ravageurs à l’automne.

Si le couvert associé reste en place au-delà d’une année (de 18 mois à 4 ans), il se nomme alors couvert permanent. Du fait de sa forte croissance pendant les intercultures et de sa longue présence, ses bénéfices sont maximisés : plus de stockage de carbone, une meilleure structure du sol, moins de mauvaises herbes, plus d’azote apporté, plus de biodiversité et une source de fourrage supplémentaire. Les espèces adaptées sont la luzerne, le trèfle et le lotier. Un couvert permanent est difficile à conduire car il ne doit pas prendre le dessus sur la culture principale.

Dans les vignes et les vergers, les couverts permanents semés entre les rangs doivent être pérennes, denses, résistants aux passages d’engins et s’installer rapidement. On mise sur le ray-grass, la fétuque et les trèfles.

Plus de diversité

Les plantes de service peuvent également être semées en bandes à l’intérieur ou à côté d’une parcelle avec des espèces qui vont, soit repousser, soit attirer les ravageurs de la culture. D’autres jachères fleuries installées dans des zones incultes favorisent la biodiversité. En bordure de cours d’eau, le couvert végétal permanent (obligatoire) pompe les fertilisants et les dérives de pulvérisation. Temporaires ou pérennes, les couverts faunistiques offrent gîte et couvert à la faune sauvage, tandis que les compositions mellifères ont une floraison très étalée pour fournir aux abeilles pollen et nectar sur plusieurs mois. 

Sabine Huet

(1) L’objectif de la Directive nitrates de 1991 est de réduire la pollution des eaux par les nitrates agricoles.
 

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