Les jardins collectifs, une bonne idée à faire pousser

Chaque année, de nouvelles communes françaises créent des jardins collectifs. Quelle est la vocation de ces espaces bien particuliers ? Pourquoi un tel engouement ?

Récolte de pommes de terre au potager © Gnis-Yves Lanceau

Du vert au cœur de la ville

Les jardins collectifs sont en plein essor… Ce sont des espaces de jardin partagé mis à la disposition des citoyens par les communes pour qu’ils puissent y cultiver un carré de potager. La taille des jardins est très variable ; en moyenne, ils regroupent 30 parcelles. On compte aujourd’hui sur le territoire français entre 150 000 et 200 000 parcelles. Chaque parcelle peut-être entretenue par une famille ou une association. Au coude à coude, chacun bèche, bine, sème et récolte. Tout le matériel nécessaire est mis à disposition… Il n’y a plus qu’à retrousser ses manches !

Plus d’un siècle d’histoire

C’est la Fédération nationale des jardins familiaux (FNJF), qui est à l’origine des jardins collectifs. Elle date de 1896. « Son objectif était alors d’accompagner la création de jardins pour les ouvriers, explique Jérôme Clément, urbaniste et directeur de la fédération. Situés en banlieue des grandes villes, ils avaient pour vocation de permettre un accès à une alimentation saine à petits prix. ».
Le tournant s’est opéré dans les années cinquante. Les jardins se sont ouverts à tous les types de famille, sans critères de classe sociale. Avec le XXIe siècle enfin, la FNJF et devenue la FNJFC. Le « c » est pour « collectifs ». Désormais, des associations ou des groupes de citoyens sans lien familial peuvent demander leur parcelle… 

Le jardin comme philosophie de vie

D’un but strictement alimentaire, les jardins se sont parés d’autres attraits au fil du temps. « Avec la crise économique que nous traversons, les jardins constituent un soutien non négligeable à l’économie familiale, analyse Jérôme Clément. Mais ce n’est pas tout… Les individus recherchent un espace de verdure et de liberté, Puis, bien sûr, il y a l’envie de créer du lien social. Les seniors coachent les jeunes, et le savoir-faire se transmet ». C’est la magie des jardins collectifs : le lien se crée au contact de la terre. Toute problématique de génération et d’origine sont abolies. « Dans les jardins collectifs de ma région, l’agglomération dijonnaise, il y a 15 à 20 origines différentes ! », ajoute Philippe Carrion, administrateur de la FNJFC.

Les parcelles aujourd’hui s’adaptent aux profils… Il n’y a quasiment plus de création de jardins sans « parcelles pédagogiques » pour les enfants. Celles-ci sont équipées et aménagées spécialement pour les enfants, et utilisées par des écoles et des centres aérés. De même, les parcelles adaptées aux séniors ou aux personnes à mobilité réduite se multiplient.

Le respect de l’environnement

Chaque jardin possède sa charte de bonnes pratiques. Elle regroupe toutes les règles de vie instaurées pour le respect des hommes et de l’environnement. Ainsi, dans les jardins collectifs on favorise le plus souvent le compostage, on incite à utiliser peu voire pas de pesticides, on éduque à la préservation de l’environnement… Et au respect de la biodiversité animale !

Des parcelles très sollicitées

Tout citoyen peut faire une demande de parcelle auprès de sa mairie ou, en l’absence de jardins, encourager la commue à se lancer dans cette belle initiative. Chaque jardin est adossé à une structure de gestion associative. Le foncier et l’équipement sont financés par la commune, mais la commune délègue la gestion et l’entretien à la FNFJC. Pour créer un jardin adapté aux spécificités de la commune et à ses besoins, la FNJFC réunit des spécialistes de la conception, des choix de terrain, des équipements, de la gestion et du jardinage.

La location d’une parcelle coûte entre 60 et 120 euros par an en province, et de 100 à 250 euros en Île-de-France. Les demandes sont souvent nombreuses et le nombre de parcelles disponibles insuffisant. Il faut donc être prêt à s’armer de patience…

La France est un des seuls pays européens à disposer d’une législation spécifique définissant l’activité et la gestion des jardins familiaux. Cette législation se trouve dans le Code rural de 2006 (Art. L 471 et Art. L&R 562). • Article L 471-1 : A défaut d'accord contraire fixant une durée plus longue, toute location de jardins familiaux que leurs exploitants cultivent personnellement en vue de subvenir aux besoins de leur foyer, à l'exclusion de tout usage commercial, est censée faite pour un an et renouvelable par tacite reconduction. • Article L 561-1 : Les associations de jardins ouvriers, qui ont pour but de rechercher, aménager et répartir des terrains pour mettre à la disposition du chef de famille, comme tel, en dehors de toute autre considération, les parcelles de terre que leurs exploitants cultivent personnellement, en vue de subvenir aux besoins de leur foyer, à l'exclusion de tout usage commercial, doivent se constituer sous la forme d'associations déclarées ou reconnues d'utilité publique conformément à la loi du 1er juillet 1901. • Articles L 562-1 et L 562-2 : Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) peuvent exercer, à la demande d'un des organismes de jardins familiaux mentionnés aux articles L 561-1 et L 561-2 et dans les conditions définies à l'article 7 modifié de la loi n°62-933 du 08 août 1962, leur droit de préemption en vue de l'acquisition de terrains destinés à la création ou à l'aménagement de jardins familiaux. A la demande des organismes de jardins familiaux, les collectivités locales ou leurs groupements ayant compétence en matière d'urbanisme peuvent également exercer pour le même objet leur droit de préemption, conformément aux dispositions en vigueur du Code de l'Urbanisme. • Article L 564-3 : Les organismes de jardins familiaux définis à l'article L 561-1 peuvent bénéficier de subvention d'investissement ou de subventions annuelles de fonctionnement de la part de l'Etat, des collectivités locales ou de leurs groupements.
Les jardins familiaux français sont nés des idées développées en Allemagne par le médecin Daniel Gottlob Moritz Schreber. Il fonda l'association des jardins ouvriers et familiaux pour « éduquer la population » et « améliorer la santé publique ». Arrivés en France au XIXe siècle, ces jardins ouvriers étaient mis à disposition des habitants par les municipalités. Ils y cultivaient des légumes, pour améliorer leurs conditions de vie. « Les jardins ouvriers professent une vocation sociale et défendent un certain ordre social : s'ils permettent aux ouvriers d'échapper à leur taudis en profitant d'un air plus respirable, ils les éloignent aussi des cabarets et encouragent les activités familiales au sein de ces espaces verts », expliquait alors l'abbé Jules Lemire, homme politique influent et prêtre du diocèse de Cambrai. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, on comptait plus de 700.000 jardins ouvriers en France. Ils deviendront des « jardins familiaux » le 26 juillet 1952.
LG
MD
SM